Aller au contenu. | Aller à la navigation

Centre Alain Savary
Navigation
Vous êtes ici : Accueil / Partenariats / Le séminaire 2013-2014 / Introduction : Appuyer et accompagner les acteurs locaux

Introduction : Appuyer et accompagner les acteurs locaux

Par skus — publié 04/07/2014 11:45, Dernière modification 14/04/2016 12:05
Questions vives du partenariat et réussite éducative 2013-2014 - complexité, tensions, besoin d'espaces partagés.

couv-rapport-QVP-2014Si l’on devait résumer l’état de la question éducative locale et de la réussite éducative, telle qu’il est apparu au cours de nos séminaires, on pourrait sans doute le faire à travers trois idées : complexité, tensions, besoin d'espaces partagés.

Complexité

La complexité de la question éducative au niveau local est liée à plusieurs dimensions :

  • complexité des situations sociales et familiales : accroissement de la précarité, recomposition des rapports familiaux...
  • complexité du travail des professionnels : les métiers de l'éducation, et notamment de l'enseignement, sont en cours de mutation, ce qui demande à chacun du temps pour traduire les nouvelles prescriptions et expérimenter de nouvelles manières d'agir.
  • complexité des relations entre institutions et dispositifs : Les dispositifs se sont accumulés depuis 40 ans dans le champ éducatif, d'autant plus dans les quartiers prioritaires, en principe pour aider les institutions à résoudre les problèmes qu'elles n'arrivent pas à traiter seules. Mais coopérer entre institutions pour faire fonctionner ces dispositifs et réinterroger le fonctionnement du droit commun ne va pas de soi...

Tensions

Du coup, les différents acteurs, (professionnels, bénévoles, parents) ont le sentiment que les tensions vont croissantes :

  • tension entre une égalité de principe affichée et les inégalités qui se produisent dans le fonctionnement réel, et dont on a du mal à parler, souvent au nom même de l'égalité de principe ;
  • tension très forte autour de la réussite ou de la non-réussite scolaire, en lien avec l'importance croissante du diplôme pour trouver un emploi dans un contexte de crise ;
  • tension autour de la pluralité des normes éducatives qui se frottent à travers l'injonction du parte-nariat faite aux différents acteurs, dont les parents.

Besoin d'espaces partagés

Pour sortir de la pensée simpliste et affronter la complexité et la pluralité des situations et des points de vue, nous manquons encore cruellement d'espaces partagés pour que collectivement les différents acteurs traitent de la question éducative. Développer ces espaces, les soutenir et les légitimer, pourrait être une priorité des politiques éducatives locales et du pilotage des institutions.

Ces espaces pourraient permettre :

  • de réguler les situations conflictuelles et les dysfonctionnements institutionnels ;
  • de débattre des normes éducatives en explicitant celles qui restent trop souvent dans le non-dit et en essayant de comprendre les normes de l'autre. Ces débats peuvent être outillés par les différents travaux de recherche en éducation qui explicitent les processus qui produisent les malentendus et les inégalités, tout en fournissant des concepts pour réfléchir collectivement ;
  • de se projeter collectivement dans un avenir souhaitable pour l'éducation sur le territoire. 

La réussite éducative, de quoi parle-t-on ?

Quand on parle de réussite éducative, il y a un risque : s'agit-il d'une réussite au rabais pour les "enfants de pauvres" qu'on va réussir à "éduquer" à défaut de les faire réussir scolairement ? Ou bien, la réussite éducative doit-elle être clairement conçue comme la réussite des acteurs locaux à organiser les conditions d’un égal accès à l’éducation pour tous les enfants ? 

Si c’est de cette deuxième conception qu’il s’agit, la coopération des acteurs locaux pourrait viser :

  • à changer le regard sur les publics (enfants et parents), en prenant l'enfant dans sa globalité, en déconstruisant les préjugés et les stéréotypes, mais aussi en réfléchissant à l'asymétrie des places et aux rapports de pouvoir qui s'instaurent entre publics et professionnels, entre professionnels des différentes institutions. 
  • à redonner du pouvoir aux enfants ou aux parents, ce qui nécessite d'accepter de laisser une partie du pouvoir que l'on a en tant que professionnel.
  • à transformer les fonctionnements et pratiques ordinaires de l'école (et des autres acteurs éducatifs…) qui discriminent, mettent en échec, excluent, font décrocher, certains enfants.

A quelles conditions ?

L'enjeu est d'arriver à construire une approche multi-scalaire des difficultés à surmonter, en regardant à la fois celles des enfants et de leurs familles, celles des professionnels et celles des pilotes et des formateurs.

Les élèves :

Comment passer de l'origine supposée des difficultés (l'origine sociale, familiale, ethno-raciale, la précarité...) à la nature des difficultés d'apprentissage (qui sont inhérentes à tout apprentissage) ? Il s'agit de comprendre ce qu'ils ne comprennent pas, de construire à l'école un apprentissage de ce que l'école requiert souvent de manière implicite et que, souvent, seuls les élèves des milieux favorisés ont appris dans leur milieu familial.

Les professionnels

Ils ont un métier, avec une histoire. Transformer un métier ne se fait pas par "prescription", on a besoin pour cela de repartir du "travail réel", en prenant le temps de comprendre ses dilemmes, ses tensions, en construisant des espaces de réflexivité outillés (par les travaux des différents champs de recherche et leurs concepts) et accompagnés. Cela demande évidemment du temps.

Les pilotes et les formateurs

Le travail et les expérimentations ont besoin d'être reconnus et légitimés par les pilotes. On ne se lance pas dans l'expérimentation et la transformation de ses pratiques sans un sentiment de confiance et de responsabilité collective (quel que soit son métier ou son institution). Les formateurs eux-mêmes ont besoin de formation pour apprendre à accompagner le travail d'équipe et l'évolution des pratiques professionnelles.

Les expérimentations ne produisent pas des "bonnes pratiques" qui seraient transférables en tout temps et en tout lieu. Ce qui peut en revanche se diffuser et se développer, ce sont les conditions qui permettent l'expérimentation et la manière dont les professionnels arrivent à problématiser et à formuler les difficultés qu'ils cherchent à surmonter par l'expérimentation. 

Il s’agit donc de réfléchir à la manière dont les différents niveaux institutionnels peuvent collaborer en vue d’appuyer, soutenir, légitimer, accompagner les acteurs locaux qui travaillent avec les publics. Tel a été l’enjeu de cette nouvelle année de séminaire.

Traces du séminaire…

Ces 6 années de réflexion partagée ont donné lieu à plusieurs publications :

Herreros G., Les Projets de Réussite Educative, analyses latérales, rapport de séminaire (novembre 2007- septembre 2008), INRP 2008

Benhayoun, A.-M., Coutinho, M., Questions vives du partenariat et Réussite Educative, carnets du séminaire, INRP  2010

Cédiey E., De l’(in)égalité de traitement dans les pratiques éducatives, synthèse et bilan de la journée d’étude du 3 octobre 2011 à l’IFé, VEI-Diversité n°168, Des différences (im)pertinentes, retour sur la question ethnique, SCEREN-CNDP, 2012

De l’(in)égalité de traitement dans les pratiques éducatives, les actes de la journée d’étude du 3 octobre 2011

Benhayoun A.-M., Construire les partenariats, présentation et analyse du séminaire, colloque de l’ANDEV du 30 novembre 2011 : compte-rendu de Monique Royer pour le Café Pédagogique

Benhayoun, A.-M., Kus, S., Questions vives du partenariat, histoire et enjeux d'une séminaire atypique et multiforme en Rhône-Alpes, VEI-Diversité n°172, La Réussite Educative, Enjeux et territoires, p. 82-85, SCEREN-CNDP, 2013

Berthet, J.-M., Kus, S., Questions vives du partenariat et réussite éducative, vers un projet éducatif partagé : entre Réussite Scolaire et Réussite Educative, quelles coopérations sur un territoire en politique de la ville ?, rapport de séminaire, centre Alain-Savary, IFé/ENS de Lyon, 2013 

Les membres du comité de suivi 2013-2014 :

Sandrine Amaré, Formatrice et chargée d’études, Collège Coopératif Rhône-Alpes (CCRA) 

Frédérique Bourgeois, directrice adjointe, Centre de Ressources pour le Développement Social Urbain Rhône-Alpes (CR-DSU)

Marion Gallizia, animatrice et coordonnatrice, Centre de Ressources Enfance-Famille-Ecole Isère (CREFE 38)

Stéphane Kus, chargé d’études, Centre Alain-Savary, Institut Français de l’Education, ENS de Lyon, 

Jean-Pierre Martin, Conseiller technique Politique de la Ville et Lutte contre les discriminations, Direction Académique des Services Départementaux de l’Education Nationale de l’Isère, Académie de Grenoble

Christine Piguillem, Direction Régionale de la Jeunesse, des Sports et de la Cohésion Sociale Rhône Alpes – DRJSCS, Pôle Développement social territorial, Service Egalité des chances et politique de la ville

Pierre Sibourg, coordonnateur, Centre Académique Michel Delay, Académie de Lyon

Accompagnement scientifique

Jean-Marc Berthet, sociologue-consultant, Professeur Associé à l’Université de Versailles / St Quentin en Yvelines

Soutien Financier

Direction Régionale de la Jeunesse des Sports et de la Cohésion Sociale – Agence Nationale pour la Cohésion Sociale et l’Egalité des chances

Un grand merci à toutes les personnes qui ont participé à ce séminaire en se déplaçant à l’Institut Français de l’Education sur 3 demi-journées entre décembre 2013 et février 2014, en venant parfois de loin…