Aller au contenu. | Aller à la navigation

Vers le facebook de Centre Alain Savary Vers le twitter de Centre Alain Savary Vers le RSS de Centre Alain Savary
Centre Alain Savary
Navigation
Vous êtes ici : Accueil / Documents / Documents Frédérique J / Choix et démarches de formation / Former à l'enseignement de l'écriture

Former à l'enseignement de l'écriture

Par fjarre — publié 04/02/2019 08:40, Dernière modification 10/05/2021 15:37
Bernadette Kervyn présente le cadre de conception et le cadre didactique à l'origine du travail d'une équipe de formateurs et d'enseignants de l'académie de Bordeaux, pour produire des ressources de formation pour l’enseignement et l’apprentissage de l’écriture au CP et CE1.

Les travaux menés par cette équipe s'appuient notamment sur les résultats de la recherche Lire-Écrire au CP dans le domaine de l'écriture, présentés par Bernadette Kervyn lors de sa conférence d’octobre 2018 au centre Alain Savary (ici).

 videokervyn

videokervyn
1- L'enseignement de l'écriture aujourd'hui 0:00
2- Démarche et objectifs 9:45
3- Qu’est-ce que c’est l’écriture ? 21:58
4- Le millefeuille 32:14
5- Le modèle de l'activité scripturale 42:58
6- Les procédures d'encodage 52:49
7- Les tâches d'écriture 57:37

L'enseignement de l'Écriture aujourd'hui

Bernadette Kervyn constate que l'enseignement de l’écriture est parfois un peu mis de côté au profit de l'enseignement de la lecture.

Ainsi, les évaluations nationales de début de CP de CE1 renseignent peu sur les compétences en écriture. Les évaluations internationales donnent peu de résultats en la matière. Par ailleurs, à l'heure actuelle, quand on parle d'enseigner le code, il est plus question de décodage que d'encodage. La question de l’entrée dans l'écrit se résume parfois à entrer dans la lecture, à penser l'interaction entre la lecture et l'écriture. Or la conférence de consensus " Ecrire et rédiger " (2018), rappelle combien les besoins en matière d'enseignement de l'écriture sont importants : il est essentiel de l'enseigner de façon progressive et continue dès la maternelle et pour cela il est primordial de former tous les enseignants à cette question.

Démarche et objectifs du groupe de travail "former à l'écriture"

La démarche est collaborative et s’inscrit dans une logique de dialogue horizontal inter-métiers et d'apports réciproques entre la théorie et la pratique, la recherche et le terrain de la classe et de la formation.

L'objectif est de produire des outils pour la formation qui soient à la fois "robustes" et potentiellement "rentables" pour les élèves, les enseignants et les formateurs, en continuité avec l'école maternelle et en lien avec l'enseignement la lecture et l’étude de la langue.  Le terme "robuste" emprunté à Aline Robert (didacticienne des mathématiques), exprime ici le fait que les outils ont à répondre aux exigences et aux contraintes du terrain et de la recherche.

Modèle des deux R

Qu'est-ce que l'écriture?

Le terme "écriture" est polysémique et les conceptions ou les approches de l'écriture sont très variables. Lors de son intervention à la conférence de consensus " Ecrire et rédiger ", par exemple, Bernard Lété, de l'université Lumière Lyon 2, aborde l’écriture sous l'angle d'un choix graphémique très complexe, plus complexe que l’acte de lecture. Dominique Bucheton insiste quant à elle sur le sujet écrivant et sur la façon de permettre aux élèves de se sentir auteurs de leurs textes. Face à cette pluralité, Bernadette Kervyn indique qu'il est important, en formation, de préciser l'objet dont on parle, de situer les discours.

Elle situe ces différents points de vue sur l'écriture sur un axe allant de conceptions techniques de l’écriture, (écrire c’est maitriser l’orthographe ou faire des choix de combinaisons graphémiques) à des approches littéraciques, fonctionnelles (la question des usages de l'écrit). Les travaux sur la littéracie Bernadette Kervyn, Les enjeux de la littéracie, capsule vidéo ESENESRTV, publiée sur le site de l'académie de Rennessont extrêmement porteurs pour l’enseignement de l’écriture car ils invitent à une vision plurielle et interdisciplinaire.

Les modèles d’écriture utilisés à l’école ou en formation semblent partiellement ajustés. Le modèle de Hayes & Flower (1980) dont les principales composantes sont l'anticipation, la textualisation, et le retour/révision, est  très riche. Cependant issu de l'étude du processus rédactionnel chez des adultes, c'est-à-dire une écriture experte, linéaire et longue, il n'est que partiellement adapté aux écrits et à l'écriture d'élèves de cycle 2. Le modèle issu des travaux d'Emilia Ferreiro (écriture tatonnée ou essais d’écriture), lui aussi très présent et intéressant, a été conçu quant à lui à partir d'observations en langue espagnole, beaucoup plus "transparente" que la langue française. Ces modèles, aussi porteurs et essentiels soient-ils, sont donc à repenser et à adapter à nos contextes scolaires.

Par ailleurs, dans cette démarche de précision de ce qu'est l'écriture, Bernadette Kervyn attire l'attention sur la confusion fréquente entre les modèles de l’écriture et les modèles d'enseignement de l’écriture. L'enseignement de l'écriture à l’école est souvent envisagé selon le modèle du projet chantier d’écriture ou selon celui du brouillon traditionnel. L'hypothèse que fait B. Kervyn, c'est que pour former à l'enseignement de l'écriture, il ne faut pas seulement questionner ces modèles d'enseignement, mais prendre appui sur des modélisations de l'écriture qui vont permettre de repenser son enseignement. 

C'est pourquoi, les premières ressources pour la formation présentées ci-dessous sont des schémas qui correspondent à des modèles de l'écriture qui fonctionnent (même) pour de jeunes scripteurs, quelques soient l'unité produite et le type d'écrit. Il s'agit de modèles englobants et curriculaires (valables du cycle 1 au cycle 4) que l'on va retrouver dans les scénarios de formation proposés.

ressources pour la formation

Les 4 ressources présentées lors de la conférence de la chercheuse formalisent d'abord des des apports théoriques sur le processus scriptural, puis sur son enseignement ainsi que sur l'activité de l'élève en situation d'écriture.

Ressource 1: Le millefeuille

Les dimensions de l'acte d'écriture

Écrire, c’est gérer simultanément plusieurs dimensions en interaction : linguistique, graphomotrice, affective, cognitive, liée aux supports et outils, aux situations langagières et aux interactions avec la lecture.

En formation, cela implique d’avoir à l’esprit qu’écrire est une activité potentiellement très complexe pour les élèves et les enseignants, que son acquisition implique en conséquence un enseignement continu et progressif, ajusté et interrogé par rapport à ces différentes dimensions de l’écriture. Comment enseigner ces différentes dimensions ? Quelles sont celles qui sont prioritaires ? Faut-il les enseigner de manière isolée ou de manière croisée ? Comment rendre cette complexité abordable ? Toutes ces questions s'accompagnent aussi d'une réflexion sur le choix des tâches et des outils proposés aux élèves, sur les aides et étayages comme sur les objectifs prioritaires.

Des exemples illustrant les différentes dimensions: 

Les dimensions de l'écriture

Ressource 2: un modèle du processus scriptural, en réponse à la complexité de l'écriture

Selon la chercheuse, la première ressource qui vise à montrer la complexité ne suffit pas. A partir de différents travaux prolongeant le modèle princeps de Hayes & Flower, et en tenant compte du fait que l’écriture ne se limite pas à de la rédaction textuelle, Bernadette Kervyn propose de schématiser en formation le processus scriptural de la façon suivante :

Modèle de l'activité scriptural

Concernant ces 3 sortes d’opération, différents travaux indiquent qu’à l’école primaire les opérations d’anticipation sont bien peu enseignées aux élèves, alors que la préparation de l’écriture constitue une réponse didactique essentielle pour gérer la complexité scripturale.

En formation, un tel schéma permet d’insister sur l'importance de ne pas réduire ce processus à l’écriture du produit visé et à des retours /révisions. Il permet d’interroger la place faite à la préparation de l’écriture avec les élèves pour rendre la complexité abordable.

Il peut aussi servir de point de départ pour interroger les manières dont ces opérations peuvent être mises en œuvre dans la classe. Ce peut être par exemple de ces deux façons :

  • en réalisant ces opérations de façon principalement successive (un temps de préparation  avant que l'enfant ne prenne l'outil scripteur, un temps consacré avant tout à l'écriture du produit visé et incluant encore de la préparation et des retours sur ce qui s’écrit, et un temps de retour sur le produit visé).
  • en segmentant l’écrit à produire et en reprenant pour chaque segment ces opérations

Ressource 3: écriture et encodage

La troisième ressource concerne l’encodage. Face aux questions fréquentes des enseignants et des formateurs sur ce que signifie « encoder » et sur la manière de l’enseigner, Bernadette Kervyn propose une définition procédurale de l’encodage établie à partir d’observations des manières de faire des scripteurs. Cette modélisation a l’avantage de mettre en avant des procédures complémentaires qui vont devoir faire l’objet d’un enseignement explicite:

  • mettre en oeuvre le découpage de la chaine orale (voie indirecte)
  • faire appel au répertoire mental de mots écrits (voie directe) : les élèves mémorisent des mots qu’ils vont ensuite être capables d’écrire sans faire appel au découpage de la chaîne orale
  • faire appel à des savoirs grammaticaux/morphosyntaxiques (marquage du pluriel, homophonie)
  • recourir à l’analogie (entre des graphèmes, des syllabes, des mots, des régularités orthograhiques...)
  • utiliser les outils de la classe (frise alphabétique, liste de mots, affiches, etc.).

En formation, plusieurs éléments sont à aborder pour compléter ce schéma  :

  • l'enseignement explicite des procédures d'encodage tout au long du processus d'écriture (de la préparation à la révision)
  • le lien avec les pratiques de l’école maternelle
  • la complémentarité entre décodage et encodage pour enseigner et apprendre le code
  • l'importance et la fonctionnalité, pour les élèves, des outils mis à leur disposition pour écrire
  • la construction de ces outils dans une perspective d'écriture (et non uniquement de lecture ou d'étude de la langue)

Ressource 4: les tâches d'écriture

L’écriture à l’école peut aussi s’envisager et être définie au travers des tâches ou des situations d’écriture : calligraphie, copie, dictée, dictée à l’adulte, à un pair, production d’écrits, préparation ou anticipation de l’écrit, relecture / modification / correction / enrichissement de l’écrit…

En formation, à partir d’une telle liste, issue de la recherche Lire et Ecrire au CP, il est possible d'amener les enseignants à réfléchir sur :

- les tâches qu’ils mettent ou non en place dans leur classe

- la manière dont elles sont mises en œuvre (par exemple dictée négociée, autodictée, dictée préparée…)

- leur enchevêtrement (produire un écrit génératif relève de la production d’écrits mais mobilise aussi la copie de parties du texte source, par ex.)

 - le sens donné aux termes « production d’écrits » qui du point de vue de la recherche englobe la production de schémas, la réponse écrite à une question, la légende d’une image par quelques mots, etc.  (et ne se limite pas à la rédaction de textes longs et aux projets d’écriture)

- les raisons pour lesquelles on peut considérer la préparation et la révision d’un écrit (même à l’oral) comme des tâches importantes d’écriture

-  les tâches et les modalités de travail qui semblent avoir un impact bénéfique sur l’acquisition des élèves (voir à ce propos les résultats de la recherche Lire et Ecrire au CP  qui souligne notamment l’importance de faire produire des phrases et des textes aux élèves tout au long de l’année). 

  • E1 : Calligraphier (lettres, syllabes, mots)
  • E2 : Copier avec modèles (lettres, syllabes, mots, phrases, textes) 
  • E3 : Copier après disparition du modèle (lettres, syllabes, mots, phrases, textes)
  • E4 : Écrire sous la dictée (lettres, syllabes, mots, phrases, textes)
  • E5 : Produire en combinant des unités linguistiques déjà imprimées (syllabes, mots, phrases)
  • E6 : Produire en dictant à autrui (lettres, syllabes, mots, phrases, textes)
  • E7 : Produire en encodant soi-même (syllabes, mots, phrases, textes)
  • E8 : Préparer la tâche d'écriture
  • E9 : Revenir sur l'écrit produit