Points communs entre les trois dispositifs
Un même postulat de départ: ouvrir la classe aux parents dans l'intérêt des élèves
Ces trois dispositifs d’ouverture sont axés sur la lisibilité de la culture scolaire. Ils postulent que cette ouverture de la classe aux parents va :
• Améliorer le climat scolaire.
• Favoriser la réussite scolaire des élèves.
Tous visent les parents «éloignés de la culture scolaire» et sont proposés à des parents volontaires.
Des objectifs communs
pour les familles
- Rendre lisibles les discours et les activités de l’école.
- Permettre aux parents d’approcher les réalités de la classe d’une autre manière que celles rapportées par l’enfant.
- Amener les parents à observer le travail de et dans la classe des enseignants avec les élèves.
- Aider les parents à mieux accompagner leur(s) enfant(s) à la maison dans leur travail scolaire.
- Construire un dialogue «à parité d’estime»*
Pour les élèves
- Réduire le "conflit de loyauté" et aider à «l'autorisation à apprendre»**
- Restaurer la confiance en soi et l'image positive de l'École.
- Améliorer les relations familiales autour du travail à la maison.
Pour les enseignants
- Développer une écoute attentive des parents et une meilleure connaissance de leur expérience de vie.
- Améliorer le recul réflexif sur leur propre travail par une dynamique d’ouverture.
- Rendre certains gestes professionnels davantage compréhensibles, explicites.
Pour les établissements et les équipes
- Se questionner sur la coéducation, expliciter les rôles de chacun à propos des tâches scolaires.
- Définir ce que l’équipe attend des parents et contractualiser les formats de collaboration.
- S’intéresser aux formes scolaires connues des parents et à leurs représentations sur l’école.
- Mutualiser les pratiques pédagogiques et les faire évoluer.
* Le concept de "parité d'estime" a été proposé par Gaston Pineau, formateur et professeur en sciences de l'éducation ("Produire sa vie" Paris Tétraède 1983). Il consiste à considérer chaque individu dans une égale dignité et à instaurer une réciprocité d'échanges, quelle que soient la disparité des places. Ce concept a été repris comme outil de formation par l'ANLCI (Agence Nationale de Lutte contre l'Illétrisme) et par le mouvement ATD Quart monde.
** Les concepts de "conflit de loyauté" et "d'autorisation à apprendre" sont issus de la psychologie et utilisés en sociologie par Bernard Lahire ("Tableaux de famille" Paris Seuil 1995) en sciences de l'éducation par Jean-Yves Rochex ( "Le sens de l'expérience scolaire". Paris, PUF, 1995) . Le premier parle de "double solitude" ressentie par l'enfant de milieu populaire face à l'univers scolaire, et le deuxième a développé l'idée de la nécessaire autorisation symbolique pour que l'enfant accède aux apprentissages scolaires non connus de sa sphère familiale.
Des modalités diFférentes
Présentation succincte des dispositifs (pour plus de détails, se référer à la page d'accueil)
REPERES « Rassembler Parent Enfant Enseignant Pour Réussir Ensemble » Écoles élémentaires REP+ Villiers-le-Bel – Gonesse (95)
- Dispositif associatif en partenariat avec l’Éducation nationale
- Trois modules de formation collective pour les parents précédant l'observation en classe
- Observation de séances centrées sur une discipline, dans une classe de même niveau que son enfant
- Retour sur les observations lors d'un «Café des parents»
« Parents dans les classes » Collège REP+Vénissieux (69)
- Dispositif initié par le REP, porté par la coordinatrice
- Observation d'un cours de même niveau que son enfant
- Accueil individualisé du parent observateur
- Entretien avec l'enseignant après l'observation, parfois à partir de vidéos : «ce qui m'a étonné, ce que je n'ai pas compris»
« Ouvrir la classe aux parents pour améliorer l’autonomie des élèves » LÉA Collège REP+ Grigny (91)
- Dispositif porté par les enseignants dans le cadre d'un LÉA (Lieu d'éducation associé de l'Ifé)
- Observation d'un cours de la classe de son enfant, centrée sur l'autonomie
- Entretien avec l'enseignant : «Quelles pratiques d'autonomie en classe, quel lien avec l'autonomie à la maison»
Des effets constatés
Du côté des parents :
- Implication de parents peu nombreux mais actifs et qui relaient vers d'autres parents.
- Les parents participants gagnent en confiance et en (auto)légitimité.
- Évolution de la démarche d’étayage parental du travail à la maison : d’«apprendre par cœur» vers «aider à comprendre».
Du côté des élèves
- Accueil favorable des dispositifs par les élèves concernés.
- Effets positifs sur la confiance en soi.
- Apaisement de situations critiques.
Du côté des équipes
- Expérience enrichissante pour les enseignants.
- Meilleure connaissance des familles.
- Meilleure lisibilité des pratiques pédagogiques.
Des points de vigilance issus du travail des équipes
Du côté des familles
- Veiller à rester dans la valorisation des parents participants.
- Veiller à faire une place aux pères.
- Éviter les dérives d’une formation «scolaire» trop normative.
- Veiller au regard des autres élèves sur celui dont le parent «retourne à l’école».
- Respecter le besoin de distance des élèves adolescents.
- Analyser les raisons de non-participation de certains parents qui restent «loin»
Du côté des équipes
- Veiller aux détails de mise en place du dispositif, (information, organisation, accueil...) car chacun contient un enjeu de coéducation et de «parité d’estime».
- Informer l'ensemble de l’équipe et accepter les controverses professionnelles.
- Éviter l’effet «millefeuilles» en lien avec d’autres dispositifs proposés.
- Rester modeste sur les objectifs des dispositifs car il est difficile de mesurer des effets sur les résultats scolaires.
Des points de controverses
Au-delà de ces points de convergences, les dispositifs font débat. Trois questions ont émergé, elles sont discutées dans la partie "débats et controverses" et dans le regard de la chercheure, Pascale Ponte.
- La démarche d’ouverture de la classe aux parents est-elle légitime ? Ou faut-il respecter le «jardin secret» des élèves et préserver le «domaine d’expertise» de l’enseignant ?
- La notion de «responsabilisation» des parents est-elle porteuse de parité d'estime ? Ou ne risque-t-on pas de culpabiliser et disqualifier les parents, lorsqu'on veut les acculturer au système scolaire ?
- Le lien est-il avéré entre implication parentale et réussite scolaire de l'élève ? Ou faut-il se centrer sur les effets sur le climat scolaire et l'évolution des pratiques enseignantes?