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Démarches d’élaboration d’imagiers plurilingues au cours préparatoire

Par skus — publié 19/05/2014 14:45, Dernière modification 14/04/2016 11:31
Atelier présenté par Fabienne Mollier, Professeur d’école (PE) Unité pédagogique pour les élèves allophones arrivants (UPE2A) Valence, Arthur Moser, Professeur d’école (PE), Cours préparatoire (CP) Valence

Imagier plurilingue 1Dans cette école qui accueille et scolarise chaque année des élèves allophones nouvellement arrivés en France, 267 des 378 élèves sont bi-plurilingues. "L’approche du plurilinguisme de la part des enseignants comme des parents n’est pas neutre" explique Fabienne Mollier, car il existe différentes manières d’appréhender le français. Cette enseignante dédiée à une UPE2A et les enseignants de CP, à des degrés d'implication variables, ont pris le parti de faire du multilinguisme de la communauté scolaire et du plurilinguisme des individus un atout pour favoriser les apprentissages et la cohésion sociale entre élèves, enseignants, parents.

La démarche :

Tout d’abord, c’est une explicitation aux élèves du projet d’élaboration d’un livre autour d’un thème choisi par l’enseignant-e de la classe : par exemple « Le voyage ». Ce thème est mis en relation avec la lecture d’un album « Le grand voyage du petit millepattes » intégré à un réseau littéraire. Les élèves ont eu à produire une courte phrase commençant par « Pour moi le voyage c’est… », puis l’ensemble des productions a été enregistré par chacun au dictaphone. A la séance suivante, les élèves ont eu à choisir un titre à  l'histoire inventée précédemment, qui constitue la phrase qui sera « exploitée » dans l’imagier. 

Imagier plurilingue 2La démarche de projet d’imagiers plurilingues a rapidement requis une mobilisation de parents « pour qu’ils nous apprennent ce qu’on ne sait pas » et les faire entrer dans la classe selon des modalités pédagogiques qui ont pris pour nom « La mini leçon » co-préparée avec l’enseignant-e. Premièrement, il s’agit d’apprendre à se dire bonjour dans la-les langue-s de l’élève et de sa mère présente, compter, dire les jours de la semaine, etc. Deuxièmement, trois élèves avec le parent et un des deux enseignants apprennent à dire, dans la langue ciblée, leur « titre histoire » puis ils s’entraînent à le calligraphier pour atteindre un degré de satisfaction permettant de le fixer dans l’imagier. Troisièmement, les élèves s’entraînent à le prononcer le mieux possible afin de s’enregistrer au dictaphone. Ainsi il est possible non seulement de réaliser un imagier matérialisé, mais aussi en ligne grâce à des photographies des pages avec « les titres-histoires » interactifs. En cliquant dessus, l’élève (s’)  entend prononcer la phrase dans la langue concernée. 

Cette démarche a donné lieu à de multiples échanges de comparaison de langues et de cultures, répondant ainsi au programme de langues vivantes au CP. Elle a permis de développer des savoirs, des savoir-faire et des savoir-être, tels qu’ils ont été conceptualisés par Louise Dabène et Jacqueline Billiez, de l’université Stendhal de Grenoble, et sont actuellement développés dans les travaux de Michel Candelier, chef de file de nombreux didacticiens du plurilinguisme.  Il ne s’agit  pas "d’apprendre les langues" mais de "découvrir des langues" et de réfléchir sur les langues comme objets de savoirs. 

L'impact sur la relation aux familles

Cette démarche a eu un impact fructueux sur les relations entre les enseignants et les parents d’élèves. En effet, les enseignants ont découvert que la question du bi-plurilinguisme préoccupaient les parents qui s’interrogent sur les choix qu’ils devaient opérer et les interpellations de leur(s) enfant(s) :

  • Faut-il parler (que) français à la maison ?
  • Quel usage de la langue familiale par les enfants ?
  • Pourquoi mon fils refuse de parler turc alors qu’il le comprend très bien ?
  • ELCO, pas ELCO (1) ?
  • Et puis cette démarche d’imagier plurilingue ne va-t-elle pas engendrer de la confusion ?
  • Etc.

Un vrai dialogue lié à la parentalité et à l’enseignement s’est instauré entre adultes afin de collaborer dans le but d’accompagner l’enfant-élève à faire des liens entre les langues et les cultures que seul, à six ans, il est bien difficile d’imaginer qu’il en ait la capacité.  Une fois entrés dans la démarche comme intervenants, les parents se sont étonnés des capacités des enfants à appréhender les langues. Il s'agissait bien ici de mettre des savoirs en commun au service de valeurs communes. Le savoir est réellement devenu une source de partage et d'échanges.

La manière dont les parents sont invités à franchir le seuil de l’école et de la classe avec une autre expertise que la pâtisserie, n’est pas sans effet sur leurs regards et appréciations portés au travail à l’école et de l’école. Réciproquement les enseignants ont modifié leurs représentations de l’implication des parents dans la scolarité de leurs enfants.

 

(1) enseignement en langue et culture d'origine, dispositif présent hors temps scolaire sur choix des familles