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Olivier Dezutter : quelle actualité pour la recherche en éducation et en formation ?

Par Patrick Picard publié 28/08/2013 11:10, Dernière modification 14/04/2016 11:27
Le chercheur en didactique du français, membre du conseil de gouvernance de l’IFE, était chargé d’une intervention inaugurale au congrès de l’AREF, à Montpellier.

Dans les années 30 déjà, Piaget déplorait le peu d’effets des travaux de recherche sur l’évolution des méthodes d’enseignement. Cette question est sans doute encore aujourd’hui au cœur de notre travail.Olivier Dezutter

De son point de vue d’enseignant-chercheur dans le champ de la didactique du français, engagé dans la formation initiale et continue au Québec, Olivier Dezutter partage ses préoccupations concernant les conditions de la production et de la circulation des savoirs de recherche. Si la recherche en sciences de l'éducation est quantitativement florissante, voire foisonnante avec ses centaines de revues et de colloques, dans des champs très différents, de la neuro-éducation à l’analyse du travail, ses résultats sont globalement peu considérés par les décideurs et praticiens. Elle évolue en fonction de facteurs externes (projets politiques, financements qui orientent les programmes, pressions évaluatives) et internes (évolution de l’institutionnalisation et de la reconnaissance des différentes disciplines, au sein de l’université elle-même) : « Nos recherches sont politiquement, historiquement, culturellement marquées, au fur et à mesure de l’évolution des politiques publiques d’Education ». On ne fait pas de la recherche en éducation de la même manière en Belgique, en France, au Québec, y compris dans le formatage des articles de revues…

Le revers de la médaille, précise-t-il, c’est le peu de visibilité des productions scientifiques des recherches en éducation, y compris au niveau médiatique. "La cuisine préoccupe davantage la télé que l’éducation" ironise-t-il. N’est-ce pas parce que la recherche en éducation est peu coordonnée, peu cumulative, dispersée, comme plusieurs rapports l’ont déjà déploré, notamment en France le rapport Prost en 2001 ? Depuis longtemps, le constat du fossé entre le champ de la recherche et le champ de la pratique est fait, déplorant les problèmes d’articulation, ne se nourrissant pas suffisamment l’une de l’autre. Les recherches participatives, collaboratives, recherche-action sont historiquement marquées, émergeant dans des contextes de facultés professionnelles, avec une confrontation forcément difficile avec les canons traditionnels des méthodes de l’université.

Préférer l’infusion à la diffusion 

« Aujourd’hui, au Québec, les responsables des financements insistent sur le « transfert des connaissances » qui doit découler des projets de recherche » explique-t-il. Un plan explicite visant à diffuser les connaissances, à favoriser la participation du public concerné par les recherches menées, à améliorer les programmes de formation et d’enseignement, notamment à travers les outils numériques, l’accès libre aux résultats de recherche et les bases de données publiques. Même si on sait qu’on joue parfois un jeu de dupes (les chercheurs ne font pas forcément ce qu’ils ont promis de faire, et les décideurs ne tiennent pas toujours ce qu’ils ont promis de faire dans leurs annonces médiatiques…), cette question du transfert de connaissance est évidemment essentielle, exigeante, parce qu’elle pose la question de la « plus-value » de ce transfert de connaissance : il faut multiplier les connaissances communes, situées, qui vont être capables de contribuer à une construction continue des pratiques professionnelles, dans une perspective « d’infusion » davantage que de « diffusion », en renforçant chez les praticiens la capacité à juger eux-mêmes ce qui est pertinent et efficace. « C’est une posture épistémologique et éthique, autant chez les enseignants que chez les chercheurs » conclut-il.

Au Canada, certaines recherches sont déjà financées par des communautés de pratiques, les associations professionnelles, présentant certains avantages dans la perspective de transfert de connaissances, même si la limite est souvent que ce soient les décideurs qui définissent les thématiques de recherche, maintenant une demande « top-down » et des conflits de temporalités, entre les résultats de recherche et les impacts possibles dans la formation des personnels. « Les conseillers pédagogiques sont sans doute une cible essentielle pour la densification des relations entre la recherche et la formation ».

Il conclut sans ambage et sans complaisance :

"Notre responsabilité dans la formation des professionnels est de questionner nos domaines d’expertise en tant que discipline de formation :

  • Quels sont les bases de connaissances, les dispositifs, l’arrimage théorique à construire concrètement dans les curriculum de formation ?
  • Quel organisation de la recherche, dans les séminaires doctoraux et la formation de jeunes chercheurs, pour former aux compétences nécessaires pour s’engager dans des recherches participatives, partenariales, ou dans des activités de transfert de connaissance ?"

 

 

 

 

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