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Former à la compréhension, la suite...

Par fjarre — publié 16/12/2018 00:00, Dernière modification 26/06/2024 15:14
Marie-France Bishop présente deux canevas d'enseignement de la compréhension élaborés avec des formateurs de l'académie de Versailles, ainsi que leur cadre didactique. L'équipe d'enseignantes et de conseillères pédagogiques qui a contribué à cette élaboration collective est composée de Martine Blanchard, Magali Caylat, Marie-Laetitia Danset, Laure Dappe, Sandrine Fraquet, Marie-France Bishop ainsi qu'Aurélie Barbérie, Marion Bellange et Gaëlle Laurin qui ont ouvert leur classe et confié leurs films. Elles ont ainsi accompagné cette réflexion collective. C'est au nom de cette équipe que le "nous" sera utilisé dans cet article.

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Cadre général de la construction des ressources 0:00
Les résultats de la recherche Lire-Ecrire 3:47
Elaboration de 2 canevas d’enseignement : lecture pas-à-pas et « visibiléo »  18:33
Le cadre didactique  24:25
La lecture pas à pas, grammaire et outils pour le formateur 38:04
Le canevas d’enseignement du « visibiléo » 45:01
Des « gestes » professionnels adaptés à la compréhension 53:54
Les projets du groupe, écrire pour comprendre 57:09

Cette intervention, à l'Ifé en octobre 2018, s’inscrit dans la continuité de la formation de novembre 2017 dont l'objet était de présenter les résultats de la recherche Lire-Ecrire (ici). 

Cadre général de la construction des ressources

A l'issue de la recherche Lire-Ecrire, un travail collaboratif avec les équipes de B.Kervyn (université de Bordeaux) et de P.Gourdet (université de Cergy Pontoise) s’est mis en place pour construire des ressources pour l’enseignement et la formation.

L’équipe pluricatégorielle de Marie-France Bishop travaille plus particulièrement la construction de scénarios de formation dans le domaine de la compréhension.

 

les résultats de la recherche Lire-Ecrire

 

Les premiers constats que présente Marie-France Bishop portent sur le temps consacré à l'enseignement de la compréhension. Peu de temps est accordé à l’enseignement de la compréhension en moyenne (16% du temps du lire-écrire). Peu de temps est accordé aux pratiques qui visent l’élaboration du sens et de l’interprétation : les tâches « comprendre l’implicite, interpréter » représentent 4% du temps d’enseignement de la compréhension en moyenne et sont absentes dans 50% des classes. Ces tâches sont le plus souvent des tâches écrites et individuelles. Mais on observe une très grande diversité des pratiques.

Marie-France Bishop évoque ensuite les effets des pratiques d’enseignement de la compréhension:

  • Le temps cumulé de toutes les tâches de compréhension n’a pas d’incidence sur les progrès des élèves.
  • Cependant accroître ce temps fait progresser les élèves les plus faibles.
  • Par ailleurs l’augmentation des tâches d’élucidation du sens (débattre, expliquer, faire un rappel, etc…) fait progresser les élèves les plus faibles ou intermédiaires.
  • Les  tâches écrites et solitaires ne font pas progresser les élèves. Or ce sont les plus nombreuses.

Finalement, le constat est paradoxal. En effet, les pratiques les plus courantes en matière d’enseignement de la compréhension sont les moins efficaces. Les pratiques les plus efficaces sont les moins courantes.

La compréhension ne dépend pas seulement de la maîtrise du code. Elle dépend aussi des autres apprentissages comme celui du lexique, des inférences, de l'étude de la langue et des pratiques culturelles. Les compétences de compréhension ne doivent pas être dissociées des compétences de décodage. Elles doivent être travaillées en tant que telles, sur des textes qui ont du sens, pour accompagner l’élève dans l’acquisition de l’autonomie en lecture. Elles peuvent être travaillées sur des textes lus, car « mieux les élèves comprennent les textes qu’on leur lit, mieux ils comprendront les textes qu’ils lisent seuls » (R. Goigoux).

Pour faire progresser les élèves, comment articuler leurs difficultés d’apprentissage en matière de compréhension, les problèmes d’enseignement et les questions de formation ?

Articuler el ens for Bishop

Elaboration de deux canevas d'enseignement:  la lecture pas-à-pas ET LE "VISIBILEO"

Le groupe de travail a envisagé l’élaboration de deux canevas d’enseignement de la compréhension :  la lecture pas à pas et le "visibiléo".

Ces deux outils permettent aux élèves de résoudre des inférences, d’anticiper et de piloter leur compréhension, de clarifier, de mémoriser, de questionner le texte, de devenir des lecteurs actifs et d’élaborer leur propre parcours du lecteur.

Ils permettent aux enseignants d’accompagner l’élaboration de la représentation mentale, de rendre explicite le travail de compréhension et d’ouvrir un espace de réflexion et d’interprétation. Ils sont présentés plus en détail dans les chapitres 5 et 6 de cette conférence.

Du côté de la formation des enseignants, l’hypothèse émise est la suivante : travailler à partir de canevas d’enseignement permet de discuter, d’échanger sur l’enseignement et l’apprentissage de la compréhension et d’apporter des réponses. Les scénarios de formation élaborés comptent 5 étapes :

  1. Faire émerger un problème de métier.
  2. Co-élaborer des séances d’enseignement à partir des canevas du « visibiléo » et de la lecture pas à pas.
  3. Expérimenter en classe.
  4. Revenir sur sa pratique.
  5. Repartir avec des activités pour la classe.

 

Le cadre didactique 

Le cadre didactique de la lecture pas-à-pas et du "visibiléo" s’appuie sur trois champs de la recherche: la psychologie cognitive, les sciences du langage et la littérature.

Il s'appuie également sur les conclusions des travaux anglo-saxons de Duke, Pearson et Strachan (2011). Ces travaux concluent que pour accroître l’efficacité des pratiques enseignantes en matière de compréhension, il faut :

  • Accroître et mobiliser les connaissances des élèves.
  • Motiver la lecture en amont, créer un "horizon d’attente".
  • Apprendre à élaborer une représentation mentale, c'est-à-dire aider à déployer le texte.
  • Apprendre à contrôler sa lecture.
  • Rendre visibles les stratégies.
  • Développer les compétences inférentielles, les liens de causalité.
  • Faire discuter et débattre les élèves (rendre les lecteurs actifs).
  • Développer le vocabulaire et les connaissances sur la langue.
  • Varier les types de textes et les modalités de lecture.
  • Intégrer lecture et écriture.
  • Observer,  évaluer le processus (Comment font les élèves pour comprendre?) plus que le produit (Est-ce qu'ils ont compris?).

Du côté des élèves,  quatre domaines de compétences sont à développer. Ces compétences ont été repensées et réorganisées en 4 domaines : les connaissances, les capacités cognitives, la métacognition et ce qui relève de l'expérience du lecteur et qui lui permet d'entrer en transaction avec le texte et d'en négocier le sens. Ce dernier domaine est également celui qui permet de porter une appréciation sur sa lecture.

4-domaines-de-competences.png

Le cadre didactique de la lecture pas-à-pas et du "visibiléo" s’appuie également sur 5 actions du lecteur : clarifier, questionner, anticiper et piloter, mémoriser et relier, mobiliser son expérience, ses émotions et son jugement.

5 actions du lecteur Bishop

 

Du côté des enseignants, le cadre théorique repose sur le canevas d'enseignement en trois temps (J. Giasson et M. Brigaudiot):

  • Le premier temps est le temps de la clarification.
  • Le second est celui de la lecture.
  • Le troisième est celui de la mémoire didactique.

Ils sont précédés d’un temps de préparation durant lequel ce qu'il y a à comprendre dans le texte, les tâches didactiques et les supports sont interrogés.

canevas-denseignement-en-3-temps.png

La lecture pas à pas, grammaire et outils pour le formateur

La lecture pas-à-pas est issue de la lecture à dévoilement progressif de A.Bon (1982) et de C.Tauveron (2002)

Sa grammaire est la suivante :

  • Le texte est lu collectivement par l'enseignant.
  • Il est découpé en fonction des nœuds de compréhension.
  • L’enseignant, à chaque arrêt, ne pose qu’une question, et une question inférentielle.
  • Les élèves émettent des hypothèses, donnent leur point de vue, mais l’enseignant ne valide pas les réponses.
  • L’objectif étant d’accompagner l’élaboration mentale des élèves.

La lecture pas-à-pas permet :

  • De faire des inférences au cours de la lecture
  • D’établir des liens logiques, des liens de causalité
  • De faire des prédictions
  • De s’assurer de la cohérence de la représentation mentale
  • De mobiliser ses connaissances
  • De mobiliser ses expériences de lecture

Elle permet de rendre visible le travail de lecteur de l'élève.

Trois types de questions inférentielles peuvent être posées pour faire des liens tout au long de la lecture :

  • Des questions de rétrospection (Que s’est-il passé ? Pourquoi cela s’est-il passé ?)
  • Des questions de clarification (Qui était le personnage ?)
  • Des questions d'anticipation (Que va-t-il se passer ?)

le canevas d'enseignement du "visibileo"

Le "visibiléo" est né dans un groupe départemental maternelle. Il est continuellement alimenté par d’autres démarches, d'autres questionnements. II est testé dans les classes et retravaillé.

Le "visibiléo" répond à un problème de métier « comment enseigner la compréhension ? », dans le prolongement de "Lectorino-Lectorinette" (R.Goigoux & S.Cèbe). Il porte plus particulièrement sur les mobiles d'action des personnages, plutôt que sur leurs émotions . Il s'agit de choisir avec les élèves, pour chaque épisode d'une histoire, ce qu'il est important de conserver. Puis au fur et à mesure, ils dessinent le parcours de lecture et retracent les liens logiques entre les événements. A la fin, ils ajoutent les éléments implicites, effectuent de nouveau le parcours du lecteur en intégrant les mobiles d’action. La finalité est de rendre visible ce double parcours : le parcours de l’histoire (ou parcours narratif), puis le parcours du lecteur.

Un exemple de "visibiléo" à partir de l'histoire "le chat botté"

Visibiléo chat botté

Le « visibiléo », c’est donc la trace élaborée avec les élèves (sur une affiche ou un TNI) pour :

  • Rendre visible l’intégration des informations, y compris implicites, et leur organisation.
  • Permettre de différencier les pensées et les paroles des personnages, d’en comprendre les intentions et les mobiles d’action.
  • Formaliser visuellement le modèle de situation.
  • Soutenir la mémorisation au service de la compréhension.
  • Matérialiser les liens logiques, la structure de l’histoire, mais aussi le parcours du lecteur qui doit combler les « blancs » du texte matérialisés par les flèches.

Le parcours narratif, les mobiles d’action et les liens de causalité sont représentés par des flèches de couleurs différentes. Chaque enseignant peut l'adapter au texte étudié.

"Un loup si bête", visibiléo réalisé en formation à Cergy (2019

visibileo-un-loup-si-bete.png

"Le lion et le vieux lièvre", visibiléo réalisé dans une classe ULIS école (2019)

un-exemple-de-visibileo-le-lion-et-le-lievre.png

Enfin, le "visibiléo" est un excellent support pour le rappel de récit.

des gestes professionnels adaptés à la compréhension

Selon Marie-France Bishop, accompagner la représentation mentale des élèves implique de :

  • Clarifier la tâche et mobiliser les savoirs et savoirs-faire en jeu.
  • Rendre le texte accessible, aider à le visualiser.
  • Rendre visible les liens avec ses propres connaissances.
  • Rendre visible les processus, les stratégies.
  • Faire reformuler, questionner, relancer pour clarifier.
  • Ouvrir un espace de réflexion.

les projets du groupe, écrire pour comprendre

Le groupe de travail a pour projet de compléter ce qui a été présenté dans la conférence en suivant trois pistes :

  • Mettre en lien les différentes composantes du lire-écrire (utiliser l'écriture et le dessin pour résoudre  un problème de compréhension, écrire pour garder en mémoire, faire des hypothèses et donner son avis).
  • Diversifier les supports (sortir des textes narratifs).
  • Evaluer la compréhension.