Former à l'étude de la langue: quelles pistes?
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Présentation du groupe de travail | 0:00 |
De la recherche à l'expérimentation | 1:57 |
Recueil de données | 5:15 |
Présentation de la démarche expérimentale
Un collectif pluri-catégoriel au sein de la commission "étude de la langue" du groupe "maitrise de la langue" de l'Essonne dans l'académie de Versailles, composé de conseillers pédagogiques, d'une IEN et d'un professeur de l'INSPÉ ont croisé leurs regards et leurs expertises sur la question de l'enseignement de l'Étude de la langue au cycle 2. Ils ont conçu des situations d'enseignement, qui ont été proposées et expérimentées dans plusieurs classes de CP.
De la recherche à l'expérimentation
En novembre 2017, la présentation des apports de la recherche Lire-Ecrire sur l'Étude de la langue par Patrice Gourdet, enseignant-chercheur à l'INSPÉ de Cergy Pontoise, a conduit ce collectif à réfléchir à une déclinaison des apports de la recherche en outils de formation. Ce collectif a ciblé l'enseignement de la morphologie et plus particulièrement la variation en genre et en nombre dans le groupe nominal.
Trois enseignantes de CP en REP se sont engagées dans une démarche expérimentale dont l'objectif était de "donner à faire et d'observer les effets." Du matériel clé en main leur a été proposé. La mise en oeuvre des séances a fait l'objet d'observations sous la forme de traces vidéo, audio et photo.
Recueil de données
Les données issues de séances réalisées dans plusieurs classes de CP ont été recueillies dans deux situations différentes :
- Situation 1: deux séances consécutives (lecture compréhension et écriture) dont l'objectif était d'observer les élèves confrontés à des groupes nominaux en réception et en production.
Le contenu des séances a été élaboré à partir d'un texte en randonnée à la manière de" Bon appétit Monsieur Lapin", rédigé par le collectif. Le déroulement de la séance a eu lieu en trois temps:
- lecture du texte par l'enseignante pour faciliter la compréhension de l'histoire puis lecture individuelle du texte;
- évaluation de la compréhension de l'histoire et plus particulière des situations de pluralité (Exemple: "Dessiner les repas des animaux."), par le recours au dessin;
- production d'écrit ayant comme finalité la production d'un nouvel épisode (production de phrases constituées du nom d'un animal et d'un aliment à accorder en nombre).
Les supports suivants ont été fournies aux enseignantes: le texte illustré pour les élèves, la fiche d'exercices pour évaluer la compréhension et la fiche de préparation détaillée.
Les séances filmées ont fait l'objet d'une analyse collective. Les lancements séances, la place laissée à l'erreur, l'institutionnalisation, l'étayage et l'explication ont été plus particulièrement observés. Des entretiens ont également été réalisés afin de mieux comprendre le rapport des enseignantes à l'étude de la langue. Le but est bien de s'appuyer en formation sur une lecture du réel.
- Situation 2: une séance décrochée d'étude de la langue, dans trois classes de CP, conçue à partir d'un corpus de groupes nominaux et du livre " Comment enseigner l'orthographe aujourd'hui?", de Brissaud et Cogis. Il a été demandé aux élèves de classer les groupes nominaux en deux colonnes et de justifier leur choix. Les explications des élèves ont fait l'objet d'une analyse dont le but était de repérer la conscience grammaticale des élèves.
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La variation dans le GN: une notion complexe | 0:00 |
Le rapport au monde des élèves de CP prime sur l'étude de la langue | 2:07 |
Quelle place donner à l'étude de la langue au CP | 11:38 |
L'analyse des données permet de mettre en exergue plusieurs éléments sur l'enseignement de l'étude de la langue.
La variation dans le GN: une notion complexe
La représentation dominante de la notion d'accord dans le groupe nominal chez les enseignants, laisse à penser que cette notion est simple pour les élèves : il suffit d'ajouter un "s" pour désigner le pluriel.
Or au CP l'élève découvre le monde de l'écrit et le décalage entre la langue orale et la langue écrite. Il est ainsi confronté à la complexité de la notion de pluriel avec notamment la fréquence des marques du pluriel muettes.
Pour faire le point sur l'accord en nombre du Groupe Nominal.
Le rapport au monde des élèves de CP prime sur l'étude de la langue
L'expérimentation a permis de mettre en avant le lien entre la compréhension et l'étude de la langue autour de la notion de pluriel.
Le recours au dessin pour évaluer la compréhension du texte lu ainsi que les entretiens avec les élèves ont permis de recueillir les représentations du pluriel et de la pluralité chez les élèves.
Plusieurs obstacles à la compréhension et à l'étude la langue, d'ordre sémantique, ont été identifiés en réception et en production.
Des exemples pris dans la situation 1 (séance de lecture):
Extrait du texte lu aux élèves: "La fourmi mangeait trois minuscules feuilles, le panda quelques feuilles jaunies et la chenille plusieurs feuilles trouées."
Réponse d'un élève
Par souci d'équité, cet élève a dessiné le même nombre de feuille pour chaque animal. Le constat est le suivant: ce qui prime ici n'est pas la compréhension du texte mais le rapport au monde de l'élève pour qui l'équité est importante. Cet exemple montre combien il est difficile de percevoir le raisonnement de l'élève à travers une simple réponse écrite.
Réponse d'un autre élève
Dans ce cas, faire la différence entre "quelques" et "plusieurs" représente un obstacle sémantique important pour cet élève qui choisit l'équité entre le panda et la girafe.
Des exemples pris dans la situation 2 (classement de groupes nominaux)
Plusieurs critères ont présidé au choix du classement des groupes nominaux par les élèves: le nombre de mots dans les GN, le sens des GN, la pluralité, les marques écrites du pluriel. On constate donc que les élèves s'éloignent parfois de la dimension sémantique pour ne garder que dimension morphologique des mots.
Et en situation de production d'écrits?
Si l'on se réfère aux résultats de la recherche Lire-Écrire, le marquage du pluriel par des élèves de CP est en cours d'acquisition.
Quelle place donner à l'étude de la langue au CP?
Les résultats de cette recherche montrent que la place accordée à l'étude de la langue au CP est importante, ce qui soulève la question de son intégration dans l'enseignement du Lire-Ecrire. En prenant appui sur cette expérimentation, le collectif de formateurs privilégie la mise en oeuvre de séances explicites et parfois spécifiques d'étude de la langue. Il propose également de saisir toutes les occasions d'observer des faits de langue avec les élèves (par exemple dans des situations de lecture, il est important d'expliciter les indices grammaticaux qui donnent des indications pour mieux comprendre).
En formation les pistes retenues convergent vers la prise en compte du rapport à la langue des élèves pour construire les compétences morphologiques. Dans le cadre d'une formation organisée en plusieurs sessions, il est possible de recueillir les représentations des élèves pour ensuite échanger et comprendre ces propositions.
Remerciements
Ce travail est le fruit de la réflexion collective d'une équipe pluricatégorielle composée de Sandrine Bertrand (CPD), Cassandre Dufait (CPC), Patrice Gourdet (MCF), Elsa Odorico (CPC), Dominique Villers (IEN, responsable du groupe départemental "maîtrise de la langue"), sans oublier les trois enseignantes qui ont participé aux différentes expérimentations: Peggy Soudrain, Emilie Provencal et Audrey Seigneurin.