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ECLAIR, un rapport critique des Inspections Générales

Par Marc Jampy — publié 20/09/2012 14:45, Dernière modification 14/04/2016 11:31
Contributeurs : Patrick Picard
Un nouveau rapport des inspections générales vient d’être rendu public, qui s’interroge sur l’élargissement des CLAIR (Collèges et Lycées pour l’Ambition, l’Innovation et la Réussite) aux ECLAIR (Ecoles, Collèges, Lycée pour l’Ambition, l’Innovation et la Réussite)

 

Un nouveau rapport des inspections générales vient d’être rendu public, qui s’interroge sur l’élargissement des CLAIR (Collèges et Lycées pour l’Ambition, l’Innovation et la Réussite) aux ECLAIR (Ecoles, Collèges, Lycée pour l’Ambition, l’Innovation et la Réussite). Il porte particulièrement sur huit académies[1].

Lire le rapport : Michel Hagnerelle, Alain Houchot, Simone Christin, Elargissement du programme CLAIR au programme ECLAIR, rapport IGEN/IGAENR, juillet 2012, 26 p.

 

Le choix des établissements est interrogé :  l’élargissement des CLAIR aux écoles était attendu, le choix de transformer tous les RAR en ECLAIR pose plusieurs problèmes. Les ECLAIR ont renforcé le déséquilibre au profit des collèges et ont entériné la carte des RAR qui aurait demandée à être revue. Quelques lycées sont rentrés dans le programme mais sans que la cohérence soit toujours lisible. Le rapport préconise donc de reprendre, à partir de données actualisées, la cartographie globale de l’éducation prioritaire à la rentrée 2013.

La faiblesse de pilotage du programme (circulaire du 7 juillet 2010, deux décrets et un vade-mecum) a entrainé une grande diversité dans les applications du programme. Il a favorisé le rapprochement des inspections et de l’administration, notamment pour la question des indemnités, mais parfois au détriment de la pédagogie. En fait, les anciennes pratiques des RAR ont globalement été reconduites. Les secrétaires exécutifs de réseau RAR (enseignants avec une décharge) ont été maintenus. La collaboration IEN/ IA-IPR, qui pourrait préfigurer une école du socle, organisant la totalité de la scolarité obligatoire, reste insuffisante. Ce rapport invite donc à redéfinir plus précisément un cadre national pour les ECLAIR et à renforcer la collaboration principal/IEN/IA-IPR.

Les auteurs reviennent ensuite sur les aspects « management » du programme ECLAIR. La fonction de préfet, qui fait le lien entre la vie scolaire et la vie pédagogique, avec  les professeurs principaux, leur semble pertinente. Toutefois, l’appellation « préfet » amène des crispations inutiles qu’on pourrait lever en la remplaçant par celle de « coordinateur de niveau ». Le rapport revient aussi sur le recrutement national avec des postes à profil. Sur 1080 postes à profils ouverts en 2012, 584 ont été pourvus, avec une attractivité différente selon les académies : 70% de postes pourvus à Aix-Marseille, mais seulement 35 % à Amiens. Le rapport se demande si les candidatures « résultent d’une réelle motivation pour l’éducation prioritaire ou si le dispositif est seulement saisi comme une aubaine pour rejoindre une région très demandée ». Le rapport révèle l’existence de postes non publiés, à la demande des chefs d’établissement, pour les contractuels « performants », ce qui pose un problème d’égalité. Sur l’indemnité spécifique ECLAIR, il note que cette indemnité ne s’applique pas aux IEN et que la part modulable a amené une confusion entre missions supplémentaires et performance. Les auteurs préconisent donc de maintenir le recrutement sur profil, mais d’harmoniser le calendrier, tout en conservant une part modulable de rémunération.

Enfin, sur l’aspect innovation qui lui semble le plus « faible » du programme ECLAIR, le rapport pointe que la confusion entre innovation et expérimentation (déroger aux règles selon l’article 34 de la loi du 23 avril 2005) est entretenue. Si dans certains établissements des projets d’EIST (Enseignement Intégré des Sciences et Techniques) ou l’inscription dans un  ROLL (Réseau d’Observation Local de Lecture) ont réussi, les ECLAIR comme les CLAIR apportent peu « d’innovations pédagogiques », et le plus souvent en marge des savoirs scolaires. Les auteurs préconisent de centrer l’innovation sur les enseignements et les apprentissages fondamentaux.

En conclusion le rapport indique que le programme ECLAIR est « une strate supplémentaire qui ne suffit pas à donner un nouveau souffle à l’éducation prioritaire » faute de réflexion sur les recrutements et les nouvelles fonctions. Il « constitue une réponse inadaptée aux grands défis de l’éducation prioritaire » par manque d’innovation pédagogique et se révèle inadapté pour impulser  une dynamique de changement dans le système éducatif par une mise en place précipitée et une circulaire de départ insuffisante. Le rapport préconise de redéfinir les objectifs de l’éducation prioritaire en l’adossant à un projet global de réussite pour l’Ecole, de repenser la géographie de l’éducation prioritaire, de simplifier l’enchevêtrement des dispositifs, de renforcer le fonctionnement en réseau et d’assurer aux équipes une stabilité. 

Ce rapport est donc le troisième rapport qui sort en quelques semaines sur l’éducation prioritaire :

- celui, plutôt positif, sur l’animation pédagogique dans les RAR, rendu en 2009 n’avait pas été publié car le précédent gouvernement lançait les CLAIR au détriment des RAR [2]

- celui sur les CLAIR, rendu en juin 2011 mais non publié sans doute à cause de son aspect très réservé sur le programme [3]

- celui-ci, sur l’élargissement des CLAIR aux ECLAIR, qui reprend ces réserves et officialise les critiques émises par les acteurs (enseignants, syndicats, direction, inspection) sur l’aspect précipité et flou du programme au détriment de la pédagogie. Il rejoint ainsi les critiques de ceux qui avaient déploré la centration du dispositif CLAIR, lancé à l’issue des Etats généraux sur la sécurité à l’école, sur un affichage sécuritaire, sans pour autant entrer dans le détail d’une évaluation de cette dimension.

 

Sur l’évaluation faite des postes à profil, le travail des inspections générales décrit les recrutements sans toutefois analyser en quoi cette évolution, maintenue par le nouveau ministère pour les personnels de direction [4], est porteuse d’avenir. La question reste donc entière, de la manière de rendre « attractifs » les postes non pourvus, en ECLAIR comme dans d’autres établissements de l’Education prioritaire : en effet, lorsque les postes « à profil » ne sont pas pourvus, la succession de personnels plus ou moins précaires risque d’être un réel problème pour l’établissement lui-même. Comment donner à des enseignants l’envie de venir dans les établissements difficiles, mais surtout d’y rester, et à quelles conditions ? 

Une proposition pour un nouveau rapport à écrire…

[1] Aix-Marseille, Amiens, Bordeaux, Clermont-Ferrand, Créteil, Lille, la Réunion, Nice.

[2] Anne ARMAND, Alain HOUCHOT, L’animation pédagogique des Réseaux Ambition Réussite, rapport de l’IGEN n°2009-089, remis en octobre 2009, 77 p. Il a été finalement publié comme d’autres rapports par le nouveau ministère en juin 2012.

[3] Jean-Paul PITTOORS, Michel HAGNERELLE, La mise en œuvre du programme CLAIR, Rapport n° 2011-069, Inspections générales IGAENR – IGEN, juin 2011, 30 p. là encore publié par le nouveau ministère en juin 2012.

[4] http://www.education.gouv.fr/pid25535/bulletin_officiel.html?cid_bo=61159

 

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