Rapport Villani-Torossian. Où en est-on ? Quels conseils pour poursuivre ?
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Qu'est-ce que le rapport Villani-Torossian ? | 00:00 |
L'hypothèse de l'effet cumulatif au centre du rapport | 06:31 |
Quatre principes pour construire une ingénierie de formation "intelligente" | 20:37 |
Reconquérir l'entrée disciplinaire en formation | 42:16 |
Questions du public | 1:18:00 |
Qu’est-ce que lE rapport Villani-Torossian ?
Le rapport sur l'enseignement des mathématiques en France, co-rédigé par Cédric Villani, député de l'Essonne, et Charles Torossian, inspecteur général de l'éducation nationale a été remis au ministre de l'Éducation nationale le lundi 12 février 2018.
Charles Torossian explique que ce rapport aborde l’enseignement des mathématiques et son efficacité ainsi que la formation initiale et continue des enseignants. Il aborde également les questions de pilotage et pointe une difficulté de notre système éducatif concernant l’encadrement intermédiaire.
Il précise que dans le cadre de l’Ecole de la confiance, l’éducation nationale doit faire confiance aux professeurs, en les outillant pour qu’ils s’occupent des élèves, mais sans être trop prescriptive. Cet outillage doit permettre aux enseignants de se situer temporellement (entrevoir l’avenir) et spatialement (établissement, équipe pédagogique, formation, …) et concerne aussi les chefs d’établissement et les pilotes pédagogiques qui représentent les courroies de transmission du système.
L’hypothèse de l’effet cumulatif au centre du rapport
Pour Charles Torossian, ce qu'il est important de comprendre, c’est que le système éducatif est un système multiplicatif, c’est-à-dire cumulatif. De la petite section de maternelle à la licence, le système se découpe en 18 strates. Les contenus d’enseignement, et la manière dont l'enseignement des mathématiques est dispensé, ont un impact sur l’année suivante, et ainsi de suite tout au long de ces 18 années : " Si un peu plus de 2% d'efficacité sont perdus chaque année, on aboutit à une perte d'efficacité de près de 40% à la fin de la licence. En revanche si 2% sont gagnés par an, on arrive à un gain de 40% en fin de cycle. C’est ce phénomène, qu'on ne peut observer qu’au bout d’un temps long, qui explique la baisse spectaculaire des résultats en mathématiques ces trente dernières années. Ces phénomènes cumulatifs sont liés par exemple au rallongement des récréations, au temps de mise au travail des élèves, surtout en éducation prioritaire".
L’objectif du rapport est de reconquérir un peu d’efficacité de l’enseignement des mathématiques dans chacune de ces 18 strates, selon la théorie des « petits pas ». Il ne contient donc pas une mesure essentielle, mais plusieurs mesures importantes. Par exemple, pour le niveau licence, le rapport propose de « réconcilier » les étudiants avec les mathématiques avant qu’ils entrent en master MEEF en créant de nouvelles unités d’enseignement. Pour le niveau collège, une mesure concerne le moment de la séance où la trace écrite doit être mise en place, etc.
Quatre principes pour construire une ingénierie de formation « intelligente » en mathématiques
Charles Torossian défend quatre idées fortes pour renforcer la formation des enseignants en mathématiques :
- Déterminer le seuil de temps à partir duquel la formation devient efficace. Les effets de la formation ne sont pas linéaires. Celle-ci devient efficace à partir d’un seuil qui est fonction du temps. En-dessous, elle n’est pas efficace. Par conséquent, il est important de trouver le point de seuil lorsqu’on construit une ingénierie de formation. Selon Charles Torossian, ce point de seuil est atteint à partir de 5 jours par an de formation en mathématiques (9 demi-journées recommandés dans le rapport Villani-Torossian). Les réseaux d’éducation prioritaire renforcés disposent du temps nécessaire pour atteindre ce seuil, à condition de ne pas se disperser dans le choix des thématiques.
- Concevoir ces jours de formation sur un temps long. Par exemple, planifier 45 jours de formation sur 5 ans plutôt que 9 jours par an pendant 5 ans pour ne pas créer de tensions systémiques sur le terrain entre les disciplines.
- Former une cohorte d’enseignants tous les ans. L’idée n’est pas d’avoir 5 jours de formation en mathématiques par an, mais de former 20% d’une cohorte tous les ans, pour « garder l’intelligence dans le système », stabiliser l’ingénierie de formation et absorber le turn-over des personnels.
- Constituer un corps intermédiaire solide pour s’occuper de la formation continue décentralisée et permanente des enseignants en mathématiques. Pour que l’ingénierie de formation telle que définie ci-dessus fonctionne, la mesure 14 du rapport préconise aussi d’augmenter dans les mêmes proportions le taux de personnels intermédiaires. Ils constituent les forces pour construire et mettre en œuvre ces formations. Actuellement, le ratio est d’un formateur qualifié pour mille enseignants dans le premier degré. L’objectif, en recrutant des référents mathématiques de circonscription à hauteur d’un demi temps plein par circonscription, est d’augmenter ce rapport jusqu'à un formateur qualifié pour deux-cents enseignants.
Reconquérir l’entrée disciplinaire en formation
Concernant les enseignants du premier degré, le rapport préconise une formation qui ne soit pas de l’information, mais de l’accompagnement. Charles Torossian insiste sur le fait que l’entrée disciplinaire doit être privilégiée. "L’accompagnement disciplinaire a besoin d’experts, ce qui manque actuellement dans les circonscriptions". C’est pourquoi il est favorable, par exemple, à la création d’un Cafipemf mathématiques.
Il estime que l’ancienneté dans le métier doit être prise en compte également. En effet, les enseignants débutant dans le métier (les 5 premières années) n’ont pas les mêmes besoins en formation que les enseignants expérimentés. Leur besoin prioritaire est la gestion de classe. "L’accompagnement de l’entrée dans le métier doit être dissociée de l’accompagnement disciplinaire".
Le rapport préconise également un changement de point de vue en formation : que l’objet central ne soit plus l’élève, mais le professeur. Il est nécessaire d’amener les enseignants à faire un pas de côté par rapport aux élèves et à avoir un regard réflexif sur les mathématiques d’abord, puis sur l’enseignement des mathématiques ensuite. En effet, l’entrée disciplinaire en formation permet, selon Charles Torossian, une meilleure assise didactique et pédagogique.
Enfin, Charles Torossian conclut son exposé en expliquant que les formations devraient être envisagées hors temps scolaire et les objets de formation définis en fonction des demandes de terrain qui émergent lors des accompagnements d'équipes. Ces demandes peuvent être recensées en regroupant des enseignants de plusieurs écoles, afin qu'ils s’autorisent à parler de leurs difficultés.
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