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Les devoirs à la maison dans les familles populaires et les dispositifs d’aide aux devoirs : Division du travail et inégalités d’apprentissage.

Par sdametto — publié 07/07/2015 17:30, Dernière modification 16/11/2016 16:15
Julien Netter a enseigné durant plus de 15 années en éducation prioritaire comme enseignant d’histoire-géographie en lycée, documentaliste en collège, professeur des écoles en école élémentaire et également en maternelle, avant de s’engager dans une carrière de chercheur avec le groupe ESCOL de l’université Paris VIII.

Journées d'étude "Questions vives du partenariat et réussite éducative. Quelles collaborations locales et institutionnelles pour améliorer l’accompagnement à la scolarité ?"

Texte rédigé à partir de la prise de notes.

Lors de son exposé, ont été présenté les résultats d’une recherche conduite en 2010-2011, avec Séverine Kakpo, intitulée Les devoirs à la maison dans les familles populaires et les dispositifs d’aide aux devoirs : Division du travail et inégalités d’apprentissage. Cette recherche porte sur tous les éléments qui circulent entre l’école, les familles et le périscolaire. Exclusivement qualitative, elle a consisté pour les chercheurs à aller dans des familles et dans une étude municipale d’une ville de la banlieue du nord de Paris pour observer et analyser ce qui se joue sur le plan des apprentissages et des socialisations scolaires.

  • Dans une première partie, à partir d’une étude de cas dans un centre périscolaire d’aide aux devoirs, il propose d’analyser ce qui est en jeu autour des devoirs.
  • Dans une seconde partie, toujours à partir d’études de cas, il propose d’investiguer la façon dont se déroulent les devoirs au sein de familles populaires.
  • En conclusion, il propose quelques pistes pour améliorer les malentendus et réduire les inégalités scolaires qui s’opèrent dans le cadre des devoirs.

Par « devoirs », Julien Netter entend aussi bien les devoirs écrits que les devoirs qui ne nécessitent pas un travail écrit, c’est à dire l’apprentissage des leçons que les enseignants prescrivent aux élèves, à faire hors l’école.

Des malentendus autour de ce que signifie « apprendre une leçon »

Lors d’une séance d’étude du soir, dans un centre périscolaire, les chercheurs s’intéressent à sept enfants de CE1 qui ont une leçon à apprendre sur le singulier et le pluriel des noms. Alors que la consigne écrite dans le cahier de texte des enfants est « apprendre la leçon singulier, pluriel (un ou des devant un nom) », l’enseignante signale aux chercheurs qu’elle a donné une autre consigne oralement « s’entrainer à apprendre les noms qui ont un pluriel en « x » ». Interrogés sur ce qu’ils ont à faire, les élèves donnent différentes réponses qui montrent que pour eux, dans le cadre du travail à faire, il ne s’agit pas d’apprendre une leçon mais de se préparer à une dictée de mots. Avec un questionnement plus insistant sur le lien entre la leçon du cahier et la consigne de travail de la maitresse, les réponses montrent que les élèves recréent une leçon à partir de ce qu’ils ont en tête et de ce qu’ils peuvent induire des mots qu’ils sont en train de s’entrainer à écrire.

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Introduction  0:00
Apprendre une leçon : les malentendus  4:04
Les devoirs entre école et familles 16:15
Conclusion, préconisations  34:51

Cette étude de cas révèle différents éléments. Tout d’abord elle montre que les devoirs, qui peuvent sembler tout à fait ordinaires et inoffensifs, posent en réalité de gros problèmes aux élèves qui sont généralement méconnus des enseignants comme des familles. En effet, la situation décrite montre que la notion centrale en jeu dans l’activité d’apprentissage : singulier/pluriel des noms, leur échappe totalement et qu’ils ne le perçoivent pas. D’autre part, on constate un malentendu fort entre les attentes de l’enseignant lorsqu’il donne la consigne « apprendre une leçon » et la compréhension des élèves des attentes de leur enseignant : savoir orthographier des mots se trouvant dans une liste en vue d’une dictée à venir.
L’expression courante « apprendre une leçon » est une expression polysémique qui peut vouloir dire de nombreuses choses comme :

  • Apprendre par cœur
  • S’approprier et savoir utiliser autrement
  • Comprendre et redire avec ses propres mots

Photo Julien NETTER

Souvent « apprendre une leçon » signifie un savant mélange de chacune de ces exigences, c’est à dire qu’il faut connaître par cœur des éléments essentiels de la leçon, la comprendre dans son intégralité et savoir redire avec d’autres mots ce qu’on ne connaît pas par cœur, tout ceci étant rarement balisé par l’enseignant.
Cette étude permet également de constater que les élèves comprennent mal les enjeux des devoirs et le sens des apprentissages scolaires. A l’école, les activités scolaires consistent en des aller-retour entre des notions et des exercices, ces derniers étant des prétextes pour asseoir les notions. Dans la situation présentée par Julien Netter, les élèves se confrontent à des tâche et s’assignent d’atteindre le but de la tâche, bien loin de l’idée qu'une notion est reliée à la tâche. De plus, ils ne semblent pas non plus avoir compris le statut de ce qu’ils sont en train de faire, c’est à dire par exemple, qu’ils ne relient pas les pluriels en « x » au contexte plus général des pluriels des noms.

Netter cahier de texte élève
 
Netter leçon pluriel

Enfin, il semble que dans cet exemple, l’enseignante n’ait pas conscience de la difficulté que représente la consigne de travail qu’elle donne aux élèves puisque le lendemain, elle évalue l’apprentissage de la leçon en soumettant les élèves à une dictée de mots dont les pluriels sont en « x ». Cette évaluation qui ne lui permet pas de savoir si les élèves ont assimilé la notion de pluriel des noms, montre en revanche que les élèves se sont préparés à la bonne tâche. On peut néanmoins s’interroger sur la pertinence et sur l’utilité à moyen et long terme du travail réalisé dans le cadre des devoirs par ces élèves et sur le fait qu’il sera valorisé par une réussite à la dictée proposée par l’enseignante. Il faut souligner de plus, que pour des enfants qui auraient eu la possibilité de travailler avec un adulte leur rappelant la leçon et ses enjeux notionnels, les devoirs auraient été profitables avec une visée à long terme.

L’enseignante, avant l’étude :
“ Je leur ai dit de s’entraîner à écrire les mots qui ont un pluriel en x avec et sans modèle, pour qu’ils sachent les écrire sans faute. Je ne sais pas s’ils s’en souviendront et s’ils le feront pendant l’étude, vous verrez... ”

Les élèves, durant l’étude :
Quels sont les devoirs ?
« il faut savoir écrire cinq mots » (Elyes) « Y’avait des mots [...] En fait c’était une dictée, comme pour une dictée on doit... à l’école on va avoir une dic- tée » (Abdallah)

Que raconte la leçon ?
« Par exemple : un château, on mettra des châteaux avec un –x. [...] par exemple, le contraire de « cette », c’est « ces ». C’est le contraire des déterminants. Et le contraire le « le », c’est « les ». [...] au singulier et euh... normal, ben c’est pareil. Ça c’est par exemple « un gar- çon écoute la radio », et le contraire c’est « des garçons écoutent la radio. »» (Fahd) « Y’a un mot, y’a le contraire. Y’a un château, des châ- teaux. [...] Juste parce qu’on rajoute un –x. Et ça en fait, ça change. » (Abdallah et Wissam) Et le pluriel, qu’est-ce que c’est ? « ça veut dire un stylo ! Un stylo, il est à toi, ben un stylo à toi et des stylos... [...] Si on trouve, si je trouve un stylo par terre, il est à personne parce qu’on sait pas mais si je trouve... Si c’est ton stylo et t’as plein de stylos, quoi... Des stylos... C’est à toi ça veut dire. » (Abdallah)

Les devoirs entre école et famille

Les devoirs représentent une prescription, portée par l’élève entre deux ou trois sphères différentes : l’école, la famille et parfois l’aide aux devoirs. Concrètement ils s’incarnent toujours en une tâche, liée à une ou des notions étudiées en classe. Cela signifie qu’il y a toujours un lien entre les devoirs et ce qui a été étudié en classe, mais les élèves n’identifient pas tous ces liens auxquels ils doivent se référer.

Des espaces de socialisations différentes dans lesquels les questions n’ont pas le même statut

Diapo école-famille-Julien NetterD’autre part les élèves sont porteurs d’une socialisation familiale, ce qui signifie que les devoirs à faire sont raccordés à la fois à l’école mais aussi à la famille. Or il existe différentes formes de socialisations familiales et celles-ci ne sont pas toutes équivalentes face aux devoirs et sont fortement corrélées au milieu social de la famille. Parmi les critères qui différencient ces socialisations familiales, on trouve le rapport à l’écrit et l’importance qu’on lui accorde dans la famille. La façon d’encadrer les enfants, ou de jouer avec eux constituent également des critères de différenciation. Enfin la façon de poser les problèmes ou de poser les questions constitue des éléments importants.

Une recherche conduite au Canada montre que la façon de poser des questions à l’école est très différente de la façon de poser des questions dans les familles, particulièrement dans les familles populaires. En effet, à l’école les enseignants posent des questions pour lesquelles ils ont les réponses, tandis que dans les familles, les parents posent plutôt des questions utiles à la vie familiale et pour lesquelles ils ne connaissent pas les réponses. Ces différences de socialisation entre la famille et l’école sont très peu perceptibles pour les professionnels de l’école et par conséquent sont rarement prises en charge ou en considération dans l’école.

Des malentendus sociocognitifs

A partir d’un exemple emprunté à Stéphane Bonnéry dans son livre Comprendre l’échec scolaire : Elèves en difficultés et dispositifs pédagogiquesCouverture Livre BONNERY, Julien Netter explique comment des malentendus sociocognitifs s’installent lorsque les enjeux des tâches réalisées en classe ne sont pas intégrés par les élèves et font l’objet d’un apprentissage à faire en devoir à la maison ou en étude périscolaire. Dans cet exemple, un élève doit apprendre une leçon portant sur la notion d’échelle en géographie. En classe, l’élève, très appliqué, s’est centré sur la tâche à réaliser, c’est à dire le coloriage de la carte, si bien que la notion travaillée lui a échappé. L’enseignante, quant à elle, n’a pas remarqué cette incompréhension de la part de l’élève puisque la carte réalisée est en conformité avec ses attendus. A ce niveau s’installe entre eux un malentendu qui ne pourra être clarifié puisque l’apprentissage de la carte est renvoyé hors l’école, dans le cadre des devoirs pour être ensuite évalué en classe. Lors de l’évaluation, l’enseignante propose comme support une carte différente de celle étudiée par l’élève la veille à l’étude périscolaire. Elle évalue l’appropriation de la notion d’échelle et donc la capacité des élèves à transposer leurs connaissances dans un autre contexte. L’élève, lui, vit comme une trahison le fait que la carte apprise ne soit pas à reproduire telle qu’il l’a mémorisée par cœur. De plus, percevant le fait que certains élèves réussissent la nouvelle tâche demandée par l’enseignante, et non conscient du malentendu, il interprète la situation avec ses propres éléments de compréhension : l’enseignante a donné à certains élèves l’énoncé de l’évaluation en amont, ce qui représente à ses yeux une première injustice et comme il se trouve que les élèves réussissant l’évaluation sont plutôt d’origine européenne, il en déduit que l’enseignante est sans doute raciste. Cet exemple montre à quel point les difficultés générées par les devoirs sont sous-estimées et parfois même inimaginables pour les enseignants.

Une implication familiale réelle et un temps consacré inversement proportionnel au niveau de qualification de la mère

Des études statistiques montrent que ce sont plutôt les mères qui accompagnent leurs enfants dans l’effectuation des devoirs et qu’elles y consacrent un temps très conséquent mesuré en moyenne à 1 heure par jour et par enfant. De plus ces études montrent que moins la mère est diplômée, plus elle consacre de temps aux devoirs de ses enfants. L’interprétation des chercheurs du groupe ESCOL est double pour expliquer cet engagement très fort. Tout d’abord, on peut imaginer que les mères les moins diplômées étant moins « sachantes », l’accompagnement des devoirs nécessitent davantage de temps. Mais on peut aussi interpréter cet engagement au regard de l’enjeu fort que représente pour elles la réussite scolaire de leurs enfants et l’accès à un diplôme qui soit un gage de réussite sociale.

Extrait d’observation (travail de S. Morello) :
La mère me confie que Nadia est punie quasi quotidiennement et qu’elle ne sait pas comment faire.
« Je l’ai vue la maitresse, elle dit que je dois être sévère que je dois plus m’en occuper, mais ici elle est sage, j’vais pas crier pour rien non ? » Je lui demande si elle l’aide pour ses devoirs, elle me répond qu’elle vérifie tout. Elle s’approche de la table ou nous avons fait les devoirs s’empare du cahier de leçon l’examine consciencieusement et dit à la petite « c’est bien ma fille » puis repose le ca- hier. Plus tard, elle me confie à voix basse qu’elle ne sait pas lire et fait semblant de vérifier. Elle voudrait bien aider sa fille mais « leurs leçons là, c’est pas possible de les comprendre alors je vérifie mais je sais que ça sert à rien, je peux pas l’aider, c’est pas possible ».

Il faut déconstruire le mythe de la démission des parents issus des milieux populaires

Les parents issus des milieux populaires, comme les autres parents, souhaitent que leurs enfants réussissent à l’école et envisagent pour eux qu’ils puissent suivre des études supérieures. Cela signifie que c’est bien la façon dont les parents sont outillés pour soutenir la scolarité de leurs enfants qui est au cœur des décalages constatés. Pour illustrer le fait que certains parents sont moins en capacité de soutenir le travail scolaire de leurs enfants lors des devoirs, Julien Netter présente le cas d’une Maman analphabète à qui l’enseignante conseille régulièrement de suivre les devoirs de sa fille en s’y intéressant et en se montrant exigeante avec celle-ci. La maman, qui ne souhaite pas informer l’enseignante ni sa fille de sa situation par rapport à l’écrit, fait donc semblant chaque jour de corriger le travail de sa fille. Ce jeu de dupes entre la mère et la fille, induit par l’école, illustre la façon dont les devoirs peuvent être à l’origine de situations familiales extrêmement douloureuses et compliquées.

Comment les devoirs contribuent à installer de la défiance dans les relations famille/école/élève entre la maternelle et l’élémentaire ?

Extrait du travail de S. Kakpo :
A.: (Sur un ton professoral) on va lire! Lis-moi ça un peu pour que je voie comment tu lis. (Douce et en- courageante) allez, on y va ! Précila, qui semble dépitée, se met à lire à voix haute.
P: Vol de bijoux...
A.: (l’interrompant) non, en principe, je t'ai expliqué qu'il faut mettre la main pour pouvoir bien suivre. Je ne fais pas comme la maîtresse. Ce que je fais, c'est pour voir si tu enregistres bien tes sons, si tu re- gardes bien parce que tu ne travailles pas pour manger la majeure partie des mots. Alors, on commence à lire. (Encourageante) allez...
P.: (S'aidant du doigt pour lire) Vol de bijoux à l'hôtel métropo[l] ...
A : D'abord, tu sais, tu as déjà mangé le « e ». Ça ne va pas!
P. : (Marquant le « e » muet) «... métropole »
A: Voilà!

En s’appuyant sur un exemple emprunté à Séverine Kakpo, Julien Netter montre comment l’injonction au partenariat éducatif, à travers la délégation des devoirs aux familles, peut créer des tensions familiales fortes sans apporter de plus-value scolaire à l’enfant, lorsque les parents ne sont pas outillés pour accompagner scolairement leur enfant. Il s’agit d’une élève de 6ème qui doit lire un texte à la maison. L’objectif de ce travail, non explicité par l’enseignante, vise la compréhension du texte. Mais la personne qui aide l’élève à faire ses devoirs a ses exigences propres en matière de lecture, qui sont centrées sur le décodage du texte et qui desservent l’élève puisqu’elles perturbent la compréhension du texte. Ces pratiques familiales qui empêchent de faire le travail demandé, que Séverine Kakpo nomment les didactiques familiales, sont à l’origine de conflits forts entre l’école et la famille, que l’élève doit assumer, et dont les enseignants ont rarement conscience.

L’aide aux devoirs dans des structures périscolaires pour aider les élèves quand les familles ne sont pas en capacité de le faire

Rapport HCE GLASMANPour l’institution scolaire, l’orientation des élèves vers une structure d’aide aux devoirs relève souvent d’une politique de compensation ; on propose l’aide aux devoirs aux enfants dont on suppose que la famille n’est pas outillée pour soutenir son activité dans le cadre des devoirs.
Des études quantitatives, dont le rapport rédigé sous la direction de Dominique Glasman pour le HCE en 2004, montrent une efficacité limitée du travail conduit dans les lieux périscolaires d’aide aux devoirs. L’équipe ESCOL s’est donc penchée sur les raisons de cette efficacité réduite.

Le nombre d’enfants à accompagner est trop important

Même dans des conditions favorables (14 enfants à l’étude du soir et des accompagnants qui sont des enseignants), le ratio de temps consacré à un élève pour une séance d’étude du soir est inférieur à 4 minutes. Sur cet intervalle de temps, l’accompagnant a le temps, au mieux, d’expliciter les consignes et d’aider l’élève à réaliser la tâche demandée. En aucun cas cela ne permet d’aborder les notions qui sous-tendent l’activité. Cela signifie donc que ces lieux d’aide aux devoirs sont, au mieux, des lieux d’aide à la mise en conformité de l’élève avec le travail prescrit par l’institution, tandis que ce qui lui serait utile, serait davantage un travail approfondi de décontextualisation de l’activité vers les notions ou de contextualisation des notions vers l’activité.

Un intervenant après une séance d’étude :
« Ben par exemple si je prends le cas de Jordan... Il avait strictement rien compris à ce qu’il fallait faire ! [...] Donc là, ben il faut prendre dix minutes, cinq minutes, et puis expliquer ce que c’est parce que... Sinon, on fait l’exercice à sa place en fait... Même si on l’aide ponctuellement sur l’exercice y va rien comprendre... Faut tout reprendre avec lui, le problème c’est qu’on peut pas tout reprendre avec les quinze enfants parce que... ».

En conclusion

Pour conclure cet exposé, Julien Netter rappelle que les devoirs écrits à faire hors la classe, ont été interdits dès 1956 et que si cette interdiction, régulièrement réaffirmée par les différents ministres de l’Education, ne s’applique pas, c’est peut-être qu’ils représentent un compromis social entre l’école et les familles le moins mauvais possible ? Pourtant les situations se sont transformées depuis 1956. A cette époque en effet, apprendre une leçon signifiait souvent apprendre par cœur un contenu relié davantage à des connaissances encyclopédiques qu’à des notions étudiées en classe. Pour les élèves d’aujourd’hui, apprendre une leçon prend un tout autre sens et représente un travail bien plus exigeant et complexe. A tel point qu’il faudrait peut-être envisager d’inverser la prescription en n’autorisant plus que le travail écrit dans le cadre des devoirs et en imposant que l’apprentissage des leçons ait lieu dans la classe en présence du maitre. 

Dans la mesure où il ne semble pas envisageable de faire appliquer l’interdiction des devoirs, l’équipe ESCOL préconise que des réflexions s’engagent sur le terrain, de manière partenariale, sur la faisabilité et l’utilité des devoirs prescrits. Il ne s’agit ni de culpabiliser, ni de déresponsabiliser les acteurs éducatifs. En matière d’éducation, professionnels et parents agissent tous pour la réussite des enfants. En revanche les pratiques de chacun peuvent être interrogées collectivement. Des expériences montrent que lorsqu’on révèle à un enseignant les difficultés que le travail qu’il prescrit produisent, il est surpris dans un premier temps puis engage une réflexion dans le sens de la faisabilité et de l’utilité des devoirs qu’il prescrit.

Enfin le travail conduit par les chercheurs dans les dispositifs d’aide aux devoirs, leur a permis de constater que ces lieux représentent un observatoire exceptionnel des difficultés scolaires des élèves, si bien que les professionnels qui y exercent ont souvent une connaissance fine de ces difficultés. Des temps d’échange autour de ces difficultés avec les enseignants permettraient certainement d’analyser au plus près la nature des difficultés des élèves.

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Photo Julien NETTER